Technique d’imagerie à ondes ultrasonores, l’échographie communément appelée écho est un examen de grande importance dans la médecine humaine et vétérinaire d’aujourd’hui. Son principe consiste à appliquer une sonde (comme un stylo) contre la peau en regard de l’organe à explorer. Cette sonde émet des ultrasons qui traversent les tissus puis lui sont renvoyés sous la forme d’un écho. Ce signal, une fois recueilli est analysé par un système informatique qui retransmet en direct une image sur un écran vidéo. L’appareil d’échographie est un échographe.
De sa toute première application médicale à nos jours, l’échographie a connu une ascension fulgurante tant sur le plan médical que technologique, avec des appareils de plus en plus développés et de plus en plus puissants. L’ingéniosité des fabricants nous amène à l’aire des appareils portatifs légers et facilement transportables qui nous changent vraiment des premiers échographes, qui autrefois étaient en noir et blanc. Aujourd’hui, ces appareils disposent d’écran couleur, de 3D, de Doppler etc., permettant ainsi de faire plusieurs examens spécifiques.
Au Niger, la pratique de l’échographie est encore balbutiante celle de l’échographie obstétricale encore plus. Si elle permet le suivi de la grossesse et le développement du fœtus, son utilisation n’est pas généralisée. Nous sommes partis du cas de la Région de Tillabéri pour nous questionner sur la fonction et le rôle de l’échographie obstétricale. Elle apparait comme un moyen de prévention des complications chez la femme enceinte et nécessite une véritable démocratisation pour sauver les mères et les enfants des complications qui peuvent se produire pendant et après la grossesse.
L’échographie comme moyen de prévention des complications chez la femme enceinte
L’échographie est un examen complémentaire, accessible et fiable dans la prise en charge de diverses pathologies. De plus, elle demeure aussi un examen très prisé pour une étude minutieuse de la grossesse de ses débuts jusqu’à ses termes. En effet l’échographie fœtale est plus que recommandée dans le suivi du développement d’une grossesse. Elle a énormément soulagé les gynécologues et les sages-femmes sur le plan gynéco-obstétrique en leur permettant de répondre à plusieurs questions (vitalité, évolution de la grossesse, présentation, etc.) à propos du fœtus ou de l’utérus et de ses annexes (myome, kyste, etc.), et de diagnostiquer très tôt les malformations fœtales et utérines. Il est inutile, ici, d’épiloguer sur l’intérêt de ce moyen d’investigation dans la surveillance fœtale.
Petite anecdote : un de nos professeurs (professeur Servais Gandji) avait l’habitude de nous dire que l’échographie est comme un prolongement de la main du gynécologue.
Si cet examen en temps réel est obligatoire chez la femme enceinte au moins trois fois selon l’Organisation mondiale de la santé (OMS), c’est-à-dire à chaque trimestre de la grossesse, il peut également tous nous concerner et peut être prescrit par le médecin pour faciliter le diagnostic de certaines maladies. En effet, elle permet l’étude de multiples organes de l’abdomen, du petit bassin et du cou (thyroïde, ganglions, foie, rate, pancréas, reins, vessie, organes génitaux) mais aussi les vaisseaux (artères et veines), les ligaments et le cœur. Elle recherche des anomalies qui pourraient les atteindre (tumeurs, infections, malformations) et peut parfois guider un prélèvement en profondeur. Les avantages de l’échographie sont bien connus : pas d’irradiation, pas de risque d’allergie, peu de contre-indications. Cet examen est rapidement réalisé, l’image est obtenue en temps réel. Il est indolore et peu couteux. Il peut être réalisé dans n’importe quel endroit via l’échographe portable. Cependant, l’un des inconvénients majeurs de l’échographie est qu’elle est opérateur-dépendant.
Dans les pays en voie de développement, l’échographie obstétricale reste la plus pratiquée à cause du fort taux de natalité qui pour rappel est de 7,5 enfants par femme en 2015. L’Etat nigérien a équipé tous les centres hospitaliers régionaux publics et les centres mères et enfants d’échographes contribuant ainsi à fournir de meilleurs soins à la population. Cependant, beaucoup d’efforts restent à déployer pour améliorer le système sanitaire, notamment par la formation des échographistes, et l’équipement des autres centres de santé.
En effet, dans la région de Tillabéri (Département du Niger), dont le nombre d’habitants était estimé à 2 175 186 habitants en 2012, peu de centres publics possèdent des échographes et toutes les machines se trouvent dans la commune urbaine. Cela reste insuffisant sachant que la plus grande partie de cette population se concentre dans les communes rurales.
En cas de manque ou d’insuffisance du liquide amniotique
Durant toute la grossesse, le fœtus évolue dans le liquide amniotique, un liquide essentiel à son bien-être et son bon développement. Le liquide amniotique reste le lieu de vie du fœtus durant neuf mois et joue un rôle très important dans son développement. Il est riche en nutriments et autres substances bénéfiques, et plus spécifiquement à son développement locomoteur et à la maturation de son appareil respiratoire.
L’insuffisance de liquide amniotique, appelée oligoamnios voire l’absence de liquide amniotique appelée anamnios, représente donc une situation à risque pour le bébé. Certains signes cliniques peuvent alerter le médecin : une hauteur utérine inférieure à la normale, un utérus moulé sur le fœtus, une diminution des mouvements du bébé. Mais c’est l’échographie qui confirme le diagnostic.
Au Niger s’il s’avère que le diagnostic est posé en fin de grossesse, généralement les gynécologues optent pour un accouchement par voie haute (césarienne) dans les plus brefs délais pour pouvoir sauver l’enfant. C’est aussi un cocon sûr et douillet qui maintient le bébé à une température constante, le protège contre les bruits, les chocs mais aussi les infections.
Au niveau de la région de Tillabéri, les données font crucialement défaut pour appuyer ces dires. Une étude prospective sur les problèmes liés à l’insuffisance du liquide amniotique se relèverait bénéfique.
Personnellement, en tant qu’échographiste de cette région, nous avons eu à référer, au niveau du Centre mère et enfant de ladite région, plusieurs cas d’insuffisance ou d’absence du liquide amniotique qui se sont soldés par un accouchement par voie haute. Les enfants et leurs mamans étaient sains et saufs.
De nos jours, une femme ne devrait normalement pas avoir à parcourir des dizaines de kilomètres pour faire une échographie. Malheureusement, de nombreuses femmes voyagent d’une zone rurale de la région de Tillabéri vers Tillabéri (commune urbaine) pour faire un simple examen d’échographie. Qu’en est-il des femmes qui ne peuvent pas faire le déplacement ?
En cas de la présentation du fœtus par le siège
L’échographie permet aussi de déceler chez la femme enceinte le fœtus en présentation par le siège, ce qui est incontestablement un fœtus à risque. Une appréciation précise des risques de cette présentation permet une prise en charge adéquate de la femme et de l’enfant.
Ces complications au cours des accouchements demeurent beaucoup plus élevées dans les pays à ressources limitées.
Selon une étude prospective sur une durée de 12 mois – du 1er janvier au 31 décembre 2007 – à propos de 170 cas sur les accouchements par siège à la maternité ISSAKA GAZOBI de Niamey menée par le Pr Nayama.M et autres, les présentations du siège ont une fréquence de 2,42% à cette dite maternité.
Dans cette étude, 110 patientes ont accouché par voie haute (Césarienne) soit 64,7%.
On constate que seulement 48,24% des patientes ont bénéficié d’une échographie obstétricale au cours de leur consultation prénatale pour une mortinatalité et une mortalité néonatale précoce de 24,12%. La fréquence de césarienne en cas de présentation du siège se situe entre 30% et 90%, selon les habitudes et le lieu géographique.
Dans les pays en voie de développement comme le Niger, la présentation du siège pose un problème de diagnostic, de surveillance et de prise en charge adaptée d’où l’intérêt pour les femmes enceintes de pouvoir faire l’échographie au cours de leur grossesse, au moins trois fois comme conseillé par l’OMS, c’est-à-dire à chaque trimestre de la grossesse.
Tous nos efforts doivent être dirigés dans ce sens pour permettre aux femmes d’avoir accès à l’échographie durant leur consultation prénatale.
Conclusion : la nécessité d’une démocratisation de l’échographie prénatale
L’Etat nigérien par le biais de son Ministère de la Santé Publique doit impérativement trouver une solution à ce problème de grande envergure en vulgarisant la pratique échographique, de façon à permettre à chaque centre où on pratique l’accouchement d’être doté d’un échographe ; en faisant cela on facilite la prise en charge des urgences obstétricales et on réduira considérablement le taux de mortalité rattaché à cela.
Certes l’échographie peut être considérée comme un examen banal mais elle reste incontestablement l’examen capital, nécessaire et indispensable de nos jours pour chaque femme enceinte.
Chaque vie mérite d’être sauvée, et chaque personne vivante qu’elle soit enceinte ou à l’état fœtale mérite d’avoir des soins adaptés et une meilleure prise en charge. Dans ce cas précis la meilleure manière de garantir une meilleure santé est de prévenir, et la plus grande prévention reste « l’échographie ».
Oui ce geste de va et vient de la sonde, oui ce geste de coup de sonde sur le ventre d’une femme enceinte peut leur sauver la vie.
Par Moussa ALI CAMARA
le 12 octobre 2018
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